Revolución








"Au Mexique, si tu ne parles pas aux gens, t'es foutu. Moi je passe mes journées dans la rue. Je vais voir les gens, j'ai du bagou, je les attire, ils m'écoutent. Je leur parle un peu, les fais rire. Puis je leur propose ce que je vends et ils achètent. Je leur dis "Donne moi ce que tu veux. Un peso, un abrazzo, nada..." Là ca fait trois heures que je travaille, je me suis fait 400 pesos ! C'est pas mal hein ! Après on va aller bouffer avec les copains. Ici c'est pareil, si tu manges pas dans la rue, tu vis pas à Mexico. Moi je connais tout, du monument de la revolucion au Zocalo. Je connais tous les types qui te vendent ce que tu peux vendre dans la rue. Au début c'est difficile, tu connais pas. Mais tu demandes, et puis après tu connais tout le monde. Si tu viens vendre avec moi, on va faire un tabac. Ca va bien marcher avec tes yeux bleus et ton sourire. Tu verras, c'est facile. Il suffit de parler aux gens et tu peux vivre. "  
 Alexandre, nom inconnu, âge inconnu. Vit au Mexique depuis ses seize ans. La peau claire, café au lait, et les yeux verts. Mais son regard est d'ici, dans toute sa dureté et sa séduction. Avec un eclat naïf qui subsiste au fond de ses pupilles. Parti comme il est venu, dans un tourbillon d'energie, je n'ai pu retenir que ses mots.

14.09.2012

Dans une cantina, des vigiles sont venus me chercher jusqu'à l'intérieur des toilettes, c'était ceux des hommes. "No se puede" m'a dit le premier. Le second a ajouté : "Y es peligroso para ti". J'ai poussé la porte des les toilettes pour femmes, deux jeunes filles s'embrassaient, appuyées sur le lavabo. Sourires, elles sortent. Je rentre. Même lieu, même heure. Seul un mur de béton sépare ces deux mondes.

Au sortir de la cantina, traverser la rue. Des hommes en pantalons moulants. Certains aux jambes longilines, perchés sur des talons de 20 centimètres. Jupe rose et regards aguicheurs. Le MarraKech.
Des néons aux couleurs fluos éclairent le bout de trottoir, la queue avant la fouille du vigile. 
A l'intérieur, les corps ne respirent pas, ils s'absorbent les uns les autres. Certains trouvent encore la place pour se déhancher. Les femmes se comptent sur les doigts de la main. Je me faufile entre ces hommes et pour la première fois depuis que je suis ici, je peux frôler et regarder sans sentir le désir du sexe opposé. Impression délicieuse, je savoure ma déambulation. 

Au balcon, Astrid Hadad apparait en diablesse. Un sourire maléfique accompagne ses premiers mots : "Si los van a maltratar que al menos se los cojan bien!" Et d'ajouter : "Como buena mexicana sufriré el dolor tranquila..!". Au diable le politiquement correct, le sexualement correct.
La salle se rit d'elle même. Les consciences s'échappent. Les esprits s'évadent le temps d'une nuit.

01.09.2012

Ce matin, dans le métro, ecrasée entre tous, un sentiment de solitude. Assis à quelques centimètres de moi, un homme lit le journal. 
Les titres : 
" Una rubia de tentación "... Des blondes en string se tiennent les seins. 
" La torturan : 100 orgasmos en un día "... Une mexicaine abattue, tête baissée.
" El insaciable seductor "... Un homme à la peau claire au sourire artificiel. 
Mon regard suit les bras du lecteur, remonte jusqu'à son visage. Un homme d'une quarantaine d'années, en costume. Nos regards se croisent. A-t-il encore la finesse d'esprit pour percevoir mon dégout, ma rage, ma tristesse ?

L'autre jour, j'ai arraché un papier collé à la va-vite dans les toilettes d'ue cantina. Il  y est écrit, plein de fautes d'orthographe  : 
" Alzamos la voz ! Insumisas en el baño, en la calle, en las escuelas, en las casas. Defiendete Mujer ! "
Suivent quelques mots en nahuatl que je ne comprends pas.
Je l'ai collé dans ma chambre. A côté d'une citation de Catherine MacKinnon :
" La sexualidad es al feminismo lo que le trabajo al marxismo : lo que nos es más propia, pero más quitada."


Pour finir, una rola écoutée il y a peu, diffusée lors d'une émission de radio sur la séxualité du point de vue féminin... Se llama " Naranjas ", d'un groupe colombien : Velandia y La Tigra.